Au cours des derniers mois, la quête perpétuelle de nouvelles connaissances concernant le COVID-19 a placé scientifiques et médecins du monde entier au premier plan, et il se trouve que beaucoup d'entre eux sont chrétiens. Aux États-Unis, La chose est particulièrement vraie pour ceux qui travaillent dans le domaine médical. Les sociologues Elaine Howard Ecklund et Christopher Scheitle rapportaient dans un livre de 2017 que lorsque l'on recense les membres du personnel soignant aux États-Unis, tels que les médecins ou les infirmières et autres, on constate que 65% d'entre eux s'identifient comme chrétiens et 24% comme évangéliques. Bien que le pourcentage de scientifiques chrétiens dans les instituts de recherche de pointe soit plus faible, ils y constituent un groupe actif et beaucoup d'entre eux s'impliquent dans leurs recherches par souci de service.

Nous avons contacté quelques-uns de ces scientifiques et médecins pour leur demander comment ils s’y prennent pour rester ancrés dans leur foi. Nous nous sommes adressés à des personnes effectuant des recherches sur les traitements ou les vaccins, améliorant les soins aux patients ou contribuant aux interventions de santé publique, certaines d'entre elles travaillant également dans les services hospitaliers. Sans pouvoir inclure ici toutes les réponses reçues, nous avons échangé avec des scientifiques aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Italie, à Singapour et en Australie. Nous leur avons demandé comment ils s'en sortaient et comment ils priaient dans le contexte de cette crise. Beaucoup ont partagé des anecdotes, des passages tirés des Écritures ou communiqué des sujets de prière. Leurs pratiques de foi varient, mais bien qu'ils exercent la médecine dans des laboratoires et des hôpitaux situés dans différents paysages géographiques et culturels, nous les avons trouvés unis dans un même objectif et un même esprit.

Francis Collins

Profession : médecin et généticien

Travaille à : Washington, DC, en tant que directeur des US National Institutes of Health (NIH, « Instituts américains de la santé »).

Domaine d’activité : Collins supervise la recherche biomédicale aux États-Unis, visant à développer des traitements et un vaccin pour contrôler le coronavirus. Il explique qu’il reçoit probablement quatre ou cinq idées intéressantes chaque jour, ce qui rend difficile de déterminer celles qui doivent être étudiées en priorité. Les NIH gèrent également un hôpital qui mène des essais cliniques, y compris dans la recherche sur le COVID-19. Avant sa nomination aux NIH, Collins dirigeait l'équipe qui avait cartographié le génome humain pour la première fois.

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Comment il prie : Collins considère son appel en tant que fonctionnaire comme un appel chrétien, où il peut utiliser les outils de la science pour soulager la souffrance. « Je prie chaque matin pour trouver la voie à suivre pour y parvenir, avec l'aide de Dieu. J'aime le livre de Josué et ce verset du premier chapitre qui dit : « Sois fort et courageux » J’en ai besoin. Je suis parfois découragé et déprimé ». Collins éprouve de la peine dans cette situation. « J'essaie de comprendre comment transformer cela en quelque chose de valable, en une meilleure connaissance de soi et en actions ».

Collins prie pour les membres du personnel de santé qui ont peur de rentrer chez eux, et pour les chercheurs, qui travaillent jour et nuit pour trouver des solutions.

Emanuele Negri

Profession : médecin

Travaille à : Reggio Emilia, une ville du Nord de l'Italie, en tant que directeur d'une unité de soins semi-intensifs dans un hôpital local.

Domaine d’activité : Negri s'occupe des patients du COVID-19 sous ventilation non invasive. Son unité de soins semi-intensifs sera adaptable aux besoins de soins au fur et à mesure de la pandémie. Ses collègues estiment que les infections liées au coronavirus se poursuivront pendant plusieurs mois, bien qu'ils prévoient de réorganiser l'hôpital pour la prochaine phase, lorsque que le nombre de cas diminuera après le pic. En équipe, ils explorent l'hypothèse selon laquelle les patients souffrant d'inflammation pulmonaire pourraient souffrir d'une réponse immunitaire amplifiée appelée « tempête de cytokine », qu'ils ciblent dans des essais avec plusieurs médicaments cliniques.

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Comment il partage sa foi : En raison de tous les équipements de protection portés par les professionnels de la santé, les patients du COVID-19 de Negri ne peuvent pas nécessairement l'entendre parler, mais ils n'y sont pas obligés pour expérimenter l'Évangile. « Ce n'est pas un temps de témoignage par la parole », déclare-t-il. « Les gens autour de moi observent mon comportement ».

Il nous partage une lettre d'un des premiers patients de son hôpital : « J'ai personnellement expérimenté un miracle dans le sens où le Seigneur m'a remis entre les mains de ces professionnels qui savent bien faire leur travail et qui, finalement, m'ont permis d'embrasser à nouveau mes proches. Je n'oublierai jamais ces doux regards cachés derrière ces barrières en plastique. Quand je pourrai sortir de la maison, je rencontrerai beaucoup de gens, peut-être même certains de ceux qui m'ont sauvé la vie, mais malheureusement je ne pourrai jamais les reconnaître. Je ne saurai pas qui ils sont, mais mes pensées iront vers eux pour toujours. Je leur dois le bien le plus précieux: la vie. Et à tous, je dis MERCI ».

« Jésus avait un "doux regard" » (Mt 9.36), déclare Negri. « Il est presque impossible de parler à mes patients maintenant, mais ils ont besoin de nos doux regards. Nous devons prier pour être capables de faire preuve d'empathie. »

Julia Wattacheril

Profession : médecin chercheur

Travaille à : New York dans un hôpital universitaire en tant que directrice du programme de lutte contre les maladies du foie gras sans lien avec l’alcool.

Domaine d’activité : En plus de maintenir les soins ambulatoires via la télémédecine, Wattacheril a été « redéployée » pour effectuer le triage des soins intensifs pendant la nuit, aidant à prendre des décisions à l'égard des patients dont la santé s'aggrave et qui ont besoin d'un niveau de soins plus élevé. Dans sa spécialité, elle et son groupe collectent des données pour mieux comprendre comment le COVID-19 affecte les patients transplantés, ainsi que les effets des thérapies actuellement à l'essai. Elle espère réutiliser un algorithme qui pourrait aider à identifier les patients à risque afin que les prestataires puissent correctement hiérarchiser les besoins en matière de récupération.

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Comment elle garde espoir : Wattacheril décrit comment elle s'est récemment découragée, alors qu'elle espérait des changements dans la direction de son lieu de travail : un nouveau ton dans la communication, une intelligence émotionnelle plus grande et une disposition à réconforter ces autres personnes qui souffrent. « J'ai prié ma colère et j'ai crié à Dieu sur mon toit. Plus tard dans la journée, il m’est revenu, grâce au passage de Jean 15, que Jésus était la vigne et nous les branches, et que mon travail consistait à demeurer en Christ. J'étais trop préoccupée par le fruit et inquiète et méfiante au sujet de ce que Dieu faisait. » Ce rappel l'a aidée à se souvenir de son objectif, et « l'espoir est rapidement redevenu tangible après cela ».

Wattacheril parle également du traitement du deuil, affirmant qu'elle utilise des pratiques qu'elle a développées il y a plusieurs années, après avoir vécu un deuil. Elle reste « ancrée dans la prière », seule ou avec d'autres. Elle médite, assise ou en promenade, et écoute de la musique ou des prédications. En outre, « j'ai une belle communauté prête à me soutenir et me rappeler ce que j'ai tendance à oublier moi-même, ainsi que des versets bibliques éprouvés me rappelant des décennies d'histoire ».

Lionel Tarassenko

Profession : ingénieur électricien

Travaille au : Royaume-Uni à l'Institut de génie biomédical de l'Université d'Oxford.

Domaine d’activité : Tarassenko travaille avec ses collègues sur le développement de nouvelles techniques de surveillance des patients, des capteurs à apprentissage automatique pour l'analyse des données. À présent, il réutilise ces outils pour lutter contre le COVID-19. Il décrit les trois applications pour lesquelles cette technologie a été adaptée : (1) la prise en charge à distance des femmes enceintes à haut risque, dans le but de prévenir les infections ; (2) le triage des patients suspectés d'être contaminés par le COVID-19 dans les « centres de soins primaires » à l'aide de la technologie des caméras vidéo et (3) la surveillance en temps réel, à l'aide de dispositifs portables, des patients atteints du COVID-19 traités dans des services d'isolement.

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Comment il met en œuvre sa foi dans son travail : « Je suis très conscient de la parabole des talents et de la nécessité d’employer ces talents là où Dieu veut que je le fasse ».

« Je suis également très conscient que notre monde ne se limite pas à ce que nous pouvons voir ou percevoir avec nos instruments scientifiques ». Citant Hébreux 11.3 : « C'est par la foi que nous comprenons que l'univers a été formé au commandement de Dieu, de sorte que ce qu'on voit ne provient pas de ce qui est visible ».

Justin Denholm

Profession : médecin spécialiste des maladies infectieuses, épidémiologiste

Travaille à : Melbourne, Australie, en tant que directeur médical du Victorian Tuberculosis Program dans un hôpital de recherche.

Domaine d’activité : Dans son hôpital, Denholm dirige une clinique de dépistage pour les personnes soupçonnées d'avoir le COVID-19. Il gère également les patients par téléphone afin qu'ils puissent éviter de venir à l'hôpital et appelle les gens pour leur donner les résultats des tests de coronavirus. Bien qu'il soit très occupé par ces tâches, il mène également un essai clinique, qui teste une gamme de médicaments pour un nombre planifié de 2500 patients hospitalisés atteints par le COVID-19.

Comment il se sent : « Pour être honnête, à ce stade, je suis assez fatigué et j'ai du mal à prier. Je suis quand même réconforté en pensant que Dieu est avec nous en toutes choses, que ce soit dans la maladie ou lorsque nous travaillons dur pour soulager ceux qui en souffrent ». Denholm espère que les chrétiens du monde entier se soutiendront mutuellement bien qu'étant physiquement à distance. « Le soutien des communautés est essentiel pour nous tous en ce moment, et je suis reconnaissant pour toutes les façons dont divers groupes parviennent à prendre soin les uns des autres, et en particulier des plus vulnérables».

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Lim Poh Lian

Profession : médecin spécialiste des maladies infectieuses, également spécialisé en santé publique

Travaille à : Singapour, au National Center for Infectious Diseases (« Centre national pour les maladies infectieuses »).

Domaine d’activité : Lim a déménagé de Seattle, dans l’État de Washington, à Singapour, car elle se sentait appelée à servir le Christ en Asie ; ironiquement, elle y est arrivée juste quelques mois avant que le SRAS n'atteigne le pays en 2003. Depuis, elle est impliquée dans la lutte contre les épidémies au sein de groupes consultatifs et de groupes de travail de l'OMS et des Nations Unies.

Pendant la pandémie du COVID-19, elle a travaillé en première ligne avec des patients. « J'adore les soins prodigués directement aux patients ». « J'aide également à développer des protocoles cliniques, de santé publique et de recherche. » Son travail à l'OMS se concentre sur l'évaluation des risques des rassemblements de masse.

Comment sa foi influe-t-elle sur son travail : « Je vois mon travail face aux épidémies comme un ministère », déclare Lim tout en expliquant comment son engagement accomplit le plus grand commandement, celui d'aimer Dieu (Mt 22.37), en réfléchissant lucidement et stratégiquement aux problèmes de contrôle des épidémies, en prenant soin avec compassion des patients, et en encourageant les gens à faire confiance en Dieu. « La foi en Christ me donne du courage et m'apporte une ancre de rationalité ». «Dieu nous a donné non pas un esprit de crainte mais un esprit d'amour, de force, et d’intelligence saine qu'il attend de nous que nous utilisions ! ».

Révisé par Léo Lehmann

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