L’enseignement supérieur vit des temps difficiles. Aux États-Unis, les universités chrétiennes sont particulièrement en crise face à la baisse des inscriptions, aux contraintes financières liées à la diminution du nombre d’étudiants et aux conflits idéologiques qui reflètent une société de plus en plus fractionnée. Les données indiquent que les jeunes sont le groupe démographique le plus susceptible de quitter les diverses formes de religion organisée.

Aujourd’hui plus que jamais, l’entrée à l’université est un moment de passage à l’âge adulte où de nombreux jeunes adultes découvrent qui ils sont et ce en quoi ils croient.

Pour les étudiants chrétiens, aller à l’université signifie ainsi trouver comment « garder la foi » et l’approfondir. La préservation de la foi dépend notamment de l’apprentissage d’un sain épanouissement de l’esprit, du cœur, du corps et de l’âme ; de l’amour de Dieu par-dessus tout et de son prochain comme soi-même ; et de la manière de bien entreprendre cette étape, non pas en évitant les erreurs (ce qui n’est pas possible), mais en prenant tôt des décisions sages pour éviter les obstacles les plus courants et les plus désastreux.

En m’appuyant sur mon expérience de professeur de théologie dans une université chrétienne, voici les habitudes et les choix que j’ai vus porter de bons fruits, ainsi que quelques-uns auxquels il vaudrait mieux résister.

1. Allez à l’Église — mais pas en ligne.

La première chose à faire, et la plus importante, est de trouver une Église locale, d’y adhérer et d’assister au culte tous les dimanches où vous êtes sur place. Mettez-vous en lien avec un ministère auprès des étudiants, participez à des retraites, rejoignez une étude biblique. Ce sont des éléments non négociables pour être un croyant à l’université. Si vous êtes dans une école chrétienne, vous pourriez être tenté de laisser les activités du campus se substituer à l’Église. Ce n’est pas une bonne idée. Rien ne peut remplacer le peuple de Dieu, la parole de Dieu, la Cène ou le culte vécu dans l’Esprit avec d’autres disciples.

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Si vous n’êtes pas dans une école chrétienne, vous pourriez être tenté de faire la grasse matinée le dimanche ou de laisser l’agitation des activités intramuros, des cours, des colocataires et des concerts vous distraire de ce qui compte le plus. Mais vous êtes déjà chrétien. Vous savez ce qui compte le plus. Allez à l’Église.

Quel genre, me direz-vous ? Je ne répondrai pas à cette question. Mais je vous dis ceci : à moins que vous n’en ayez besoin pour des raisons de santé ou d’accessibilité, le culte en streaming ne devrait pas être envisagé. Ce n’est pas la même chose. Trouvez une communauté locale, un corps de croyants qui prient, écoutent les Écritures, proclament la bonne nouvelle, célèbrent la communion et servent leur prochain.

Le culte chrétien est composé de la Parole et du sacrement — chacun est essentiel. Parole et sacrement ne signifie pas « parole et groupe de louange ». […] Si vous voulez que votre foi survive à l’université, vous avez besoin des sacrements. Et vous avez besoin d’autres croyants.

2. Déconnectez des réseaux sociaux — pour de bon.

Je donne un cours sur le thème du discipulat chrétien et de la technologie numérique. Aucun de mes élèves ne proteste lorsque je leur dis qu’ils sont — que nous sommes — accros aux écrans. Aucun d’entre eux ne nie qu’il aimerait pouvoir réduire de moitié (ou plus) le temps qu’il passe quotidiennement sur son smartphone (généralement de 4 à 8 heures ; un étudiant en passait en moyenne 12 par jour). Mais tous supposent que c’est impossible.

Au cours du semestre, je les invite à supprimer toutes les applications non essentielles de leur téléphone pendant un mois. Fini YouTube, Instagram ou TikTok. Ils imaginent que leur vie va s’arrêter brutalement. Mais voici ce qu’ils découvrent à la place : non seulement ils n’en ont pas besoin, mais cela ne leur manque même pas.

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Je vous invite à faire de même. S’il est trop difficile d’effacer complètement ces applications, limitez votre utilisation quotidienne à 1 ou 2 heures. Déconnectez-vous en particulier le dimanche. Si vous rencontrez quelqu’un, échangez vos numéros de téléphone ou vos adresses électroniques. Votre santé spirituelle et mentale montera en flèche même si celle des autres s’effondre. Faites-le. Vous me remercierez plus tard.

3. Construisez-vous une bibliothèque — dès maintenant.

Ma première règle en tant que professeur est de ne jamais demander de lire un livre que je n’aime pas — un mauvais livre, un livre ennuyeux ou un livre mal écrit — mais tous les professeurs ne vivent pas ou ne peuvent pas vivre selon cette règle. Mais tous les livres ne changent pas la vie.

Cependant, certains, voire beaucoup, des textes que vous rencontrerez vaudront la peine que vous y consacriez du temps. S’ils méritent votre attention aujourd’hui, ils vaudront la peine d’être revus plus tard. Ne les considérez pas comme des obstacles sur le chemin de votre diplôme. Considérez-les comme centraux, la raison première pour laquelle vous êtes à l’université.

Si vous vous êtes débarrassé des médias sociaux (ou du moins de la plupart d’entre eux), vous pourrez rester assis avec un livre sur les genoux pendant plus de cinq minutes d’affilée. Si le livre représente quelque chose pour vous, s’il vous parle ou suscite quelque chose en vous, ou même s’il semble représenter quelque chose pour d’autres personnes que vous respectez, gardez-le. Si vous en avez les moyens, ne l’empruntez pas. Achetez-le. Conservez-le. Vous sortirez de l’université avec une petite bibliothèque qui ne cessera de s’enrichir.

Laissez ces années planter une graine qui germera tout au long de votre vie — un désir ardent de continuer à lire sur le monde qui vous entoure et sur l’œuvre de Dieu dans ce monde.

4. Faites-vous des amis — parmi les morts (et les autres).

Une vieille phrase latine dit : nemo nisi per amicitiam cognoscitur. En gros, on pourrait traduire par « personne ne connaît rien si ce n’est par l’amitié » (ou l’amour). C. S. Lewis affirmait qu’il existait quatre amours. J’aime à penser qu’il existe quatre amitiés, et qu’elles sont peut-être plus répandues sur un campus universitaire que n’importe où ailleurs.

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Tout d’abord, il y a l’amitié avec les morts — les auteurs qui ne sont plus parmi nous, mais dont les livres continuent à vivre. Stanley Hauerwas observait un jour que ce qui rend Lewis si éternellement populaire, c’est sa capacité à se lier d’amitié avec ses lecteurs : « Il se met à la disposition de ses lecteurs comme un ami de confiance en Christ. »

Trouvez d’autres personnes qui font la même chose que lui. Liez-vous d’amitié avec les morts.

Après cela, il y a l’amitié avec les vivants. J’en dirai plus à ce sujet dans la prochaine section.

Vient ensuite l’amitié avec les aînés, une relation que l’on décrit souvent comme mentorat. Trouvez un professeur, un pasteur ou un patron — quelqu’un de plus âgé que vous respectez, idéalement (mais pas nécessairement) un croyant comme vous. Frappez à sa porte. Interrompez son emploi du temps. Posez-lui des questions. Faites-vous inviter à prendre un café ou même à vous rendre chez lui. Il ne s’agit peut-être pas d’une amitié pour l’instant, mais une fois que vous aurez obtenu votre diplôme, les choses pourraient évoluer dans ce sens.

Après avoir obtenu leur diplôme, mes anciens étudiants ont du mal à m’appeler « Brad » au lieu de « Professeur East ». Mais cela finit par se faire. Certains d’entre eux restent en contact avec moi pendant des années. C’est une chose merveilleuse.

Enfin, prêtez attention à l’amitié avec le Christ. Quelques heures avant son arrestation, Jésus est avec ses disciples dans la chambre haute. La dernière fois qu’il s’adresse à eux avant la croix, il leur dit : « Vous, vous êtes mes amis » (Jn 15.14). Il étend cette relation à des hommes sur le point de l’abandonner et de le trahir. Dieu en chair et en os se lie d’amitié avec nous en Jésus. Il nous considère non seulement comme des disciples, mais aussi comme des amis.

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La vie de foi n’est rien d’autre que la perpétuation d’une amitié à vie avec le Christ. Que vos années d’université soient centrées sur cela, et les choses se passeront bien.

5. Organisez des fêtes — mais pas n’importe lesquelles.

L’université est une période festive. La question n’est pas de savoir s’il faut faire la fête, mais comment.

Vous êtes chrétien, vous savez donc ce qu’il faut éviter : ne vous enivrez pas. Ne couchez pas avec n’importe qui. N’enfreignez pas la loi. Ignorez les appels inconsidérés à « profiter de sa jeunesse ». Indépendamment même du problème du péché, ces voies aspirent la vie hors de vous. Le plaisir qu’on en tire n’est que très passager. Restent surtout des regrets et de la honte. Le Christ est capable et désireux de couvrir tout cela lorsque cela arrive, mais vous pouvez choisir la vie avant même de vous y être enfoncé.

C’est justement là qu’intervient l’amitié avec les vivants.

Quel que soit l’endroit où vous et vos amis vivez — un dortoir, un appartement, une propriété locative — faites-en un espace d’accueil pour les amis, les étrangers, les nouveaux venus et ceux que l’on laisse de côté. Regardez des matchs de football, suivez des événements marquants et des finales de séries. Surprenez vos colocataires à leur anniversaire. Déguisez-vous. […] Si vous n’avez pas un sou en poche, mangez des raviolis. Si quelqu’un a de l’argent en plus, qu’il le mette à profit pour tous. Tout ne doit pas être épargné. Il faut parfois faire preuve d’un peu d’extravagance.

6. Mangez bien — et dormez un peu.

Ce conseil est très simple. Rien, et je dis bien rien, n’améliorerait davantage la vie de mes étudiants qu’un sommeil suffisant. Et par « suffisant », je ne veux pas dire six heures, même si beaucoup d’entre eux vivent avec trois ou quatre heures par nuit. Je veux dire huit ou plus.

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Imaginez que vous passiez des semaines et des semaines sans eau. C’est ce que l’insomnie chronique fait à votre corps. Alors, dormez un peu. (Et pas avec un smartphone à proximité. Il n’y a rien de pire pour vous.)

Plus généralement, prenez soin du corps que Dieu vous a donné en mangeant bien et en faisant de l’exercice. Ou mieux : lorsque vous mangez, cuisinez vos propres aliments et lorsque vous faites de l’exercice, faites-le en plein air. Comme l’écrit Paul : « Vous ne vous appartenez pas à vous-mêmes, car vous avez été rachetés à un grand prix. Rendez donc gloire à Dieu dans votre corps. » (1 Co 6.19-20)

7. Dites merci — à tout le monde.

Trop souvent, c’est à l’université que les étudiants en viennent à voir leur foyer comme rétrograde et embarrassant, qu’il s’agisse d’une ville, d’une Église ou d’une famille. Cette « prise de conscience » n’est pas nécessairement une marque de maturité ou de progrès. Elle peut être une autre forme de rébellion adolescente. Résistez-y à tout prix.

L’université devrait être le début d’une vie de gratitude. Écrivez des mots de remerciement. Envoyez une carte à un parent. Envoyez un courriel à un entraîneur. N’imaginez pas que vous êtes meilleur que là d’où vous venez, même si vous avez eu une enfance difficile. Trouvez quelqu’un pour qui remercier Dieu, puis remerciez vous-même cette personne.

Quelqu’un a essuyé votre nez et changé vos couches. Quelqu’un vous a amené là où vous êtes. Il est temps de réaliser que vous n’êtes pas et ne serez jamais le seul fruit de vos efforts. Personne ne l’est. Comme tout le monde, vous appartenez à Dieu, qui a fait de vous ce que vous êtes grâce à la sueur et aux larmes d’innombrables autres personnes, généralement anonymes. Celles dont vous connaissez le nom méritent d’être remerciées.

Vous apprendrez de nouvelles choses à l’université. Cet apprentissage vous changera ; il est censé le faire. Mais tout ce que vous apprenez est destiné à édifier les autres, et non à vous enfler vous-même. Laissez la gratitude envelopper ce que menace la vanité. Être reconnaissant en toutes choses fait obstacle à une multitude de péchés.

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Si, au bout de quelques années, vous ressortez humbles, priants et reconnaissants de l’université, alors, quel que soit votre diplôme, ce temps aura été une réussite. Vous aurez montré — ou plutôt, Dieu aura montré à travers vous — que garder la foi à l’université n’a rien d’impossible. C’est à cela que le Christ vous appelle. Et il vous donnera toujours ce dont vous avez besoin pour faire sa volonté.

Brad East est professeur associé de théologie à l’Université chrétienne d’Abilene.

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